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Page:De Gaspé - Mémoires. 1866.djvu/52

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MÉMOIRES.

eu beau lui dire que j’étais un Écossais très pacifique et un ami de la maison, que nous étions même lui et moi un peu compatriote, je ne pouvais réussir à le calmer. Mais comme on finit toujours par s’entendre avec de bonnes raisons, votre cerbère a fini par capituler aux conditions suivantes, savoir : qu’il me serait loisible d’entrer dans la maison, de prendre possession d’une chambre à coucher, de me mettre même au lit, pourvu que le dit Niger ne me perdit pas un instant de vue, et qu’il se posât en sentinelle jusqu’au jour, devant la porte de ma chambre. Il craignait, je suppose, qu’on ne troublât mon repos. Et ma foi ! comme chacun de nous a respecté religieusement les articles de la capitulation, je n’ai fait qu’un somme pendant toute la nuit, sous l’égide du sieur Niger.

Je finirai ce chapitre par une excentricité, anglaise, dont mon oncle Charles de Lanaudière, qui avait vécu plusieurs années en Angleterre, amusait ses amis du Canada.

Un lord, dont j’ai oublié le nom, poussait le luxe jusqu’à ne point se passer d’une bande de voleurs de grands chemins ; non pour dévaliser les autres à l’instar de certains seigneurs châtelains du bon vieux temps de la chevalerie, mais pour se faire voler lui-même.

Chaque fois que le bon Lord retournait, pendant la nuit, de Londres à son château, en sortant soit du parlement, soit d’un dîner ou du théâtre, son carrosse était infailliblement arrêté, au même lieu, par la même troupe de bandits. Sa seigneurie baissait elle-même