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Page:De Gaspé - Mémoires. 1866.djvu/531

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les mêmes envers leurs censitaires. Je prends un type au hasard : les seigneurs de Kamouraska. Il me semble toujours avoir connu monsieur et madame Taché : leur fils Paschal, portant le même nom que son père, était, avec feu le docteur Couillard de Saint-Thomas, mes deux plus anciens amis ; et la mort seule a brisé les liens d’une amitié sans nuage formée dès l’âge le plus tendre.

Je faisais de fréquentes et longues visites à mes amis de Kamouraska, et j’ai été témoin des égards, du respect, de l’amour dont ils étaient l’objet de la part de leurs censitaires. Mon jeune ami Paschal, aussi aimable que doux, était d’une familiarité avec les habitants qu’on aurait cru devoir l’exposer quelquefois, à des désagréments, surtout de la part de la jeunesse, mais point du tout, il ne s’écartait jamais du respect qu’ils croyaient devoir à leur jeune seigneur, tout enfant qu’il était.

J’ai souvent accompagné avec son fils madame Taché dans les fréquentes visites qu’elle faisait aux pauvres et aux malades de sa seigneurie, chez lesquels elle était accueillie comme une divinité bienfaisante. Outre les aumônes abondantes qu’elle distribuait aux familles pauvres, elle portait à ceux de ses censitaires malades, qui n’auraient pu se les procurer, les vins, les cordiaux, les biscuits, propres à accélérer leur convalescence, et toutes les douceurs que sa générosité ingénieuse lui suggérait. Aussi régnait-elle en souveraine dans sa seigneurie par les liens bien chers de l’amour et de la gratitude.