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Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, 1619, édition Boulenger, 1909.pdf/127

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votre corps, si que votre cœur demeure lui tout seul en la présence de Dieu seul. C’est l’exercice que faisait le roi David parmi tant d’occupations qu’il avait, ainsi qu’il le témoigne par mille traits de ses psaumes, comme quand il dit : « O Seigneur, et moi je suis toujours avec vous. Je vois mon Dieu toujours devant moi. J’ai élevé mes yeux à vous, o mon Dieu, qui habitez au ciel. Mes yeux sont toujours à Dieu ». Et aussi les conversations ne sont pas ordinairement si sérieuses qu’on ne puisse de temps en temps en retirer le cœur pour le remettre en cette divine solitude.

Les père et mère de sainte Catherine de Sienne lui ayant ôté toute commodité du lieu et de loisir pour prier et méditer, Notre Seigneur l’inspira de faire un petit oratoire intérieur en son esprit, dedans lequel se retirant mentalement, elle pût parmi les affaires extérieures vaquer à cette sainte solitude cordiale. Et depuis, quand le monde l’attaquait, elle n’en recevait nulle incommodité, parce, disait-elle, qu’elle s’enfermait dans son cabinet intérieur, où elle se consolait avec son céleste Époux. Aussi dès lors elle conseillait à ses enfants spirituels de se faire une chambre dans le cœur et d*y demeurer.

Retirez donc quelquefois votre esprit dedans votre cœur, où, séparée de tous les hommes, vous puissiez traiter cœur à cœur de votre âme avec son Dieu, pour dire avec David : « J’ai veillé et ai été semblable au pélican de la solitude ; j’ai été fait comme le chat-huant ou le hibou dans les masures, et comme le passereau solitaire au toit ». Lesquelles paroles, outre leur sens littéral (qui témoigne que ce grand roi prenait quelques heures pour se tenir solitaire en la contemplation des choses