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Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, 1619, édition Boulenger, 1909.pdf/284

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CHAPITRE XXXII

DES JEUX DÉFENDUS


Les jeux des dés, des cartes et semblables, èsquels le gain dépend principalement du hasard, ne sont pas seulement des récréations dangereuses, comme les danses, mais elles sont simplement et naturellement mauvaises et blâmables ; c’est pourquoi elles sont défendues par les lois tant civiles qu’ecclésiastiques. Mais quel grand mal y a-t-il, me direz-vous ? — Le gain ne se fait pas en ces jeux selon la raison, mais selon le sort, qui tombe bien souvent à celui qui par habilité et industrie ne méritait rien : la raison est donc offensée en cela. — Mais nous avons ainsi convenu, me direz-vous. — Cela est bon pour montrer que celui qui gagne ne fait pas tort aux autres, mais il ne s’ensuit pas que la convention ne soit déraisonnable, et le jeu aussi ; car le gain qui doit être le prix de l’industrie, est rendu le prix du sort, qui ne mérite nul prix, puisqu’il ne dépend nullement de nous.

Outre cela, ces jeux portent le nom de récréation et sont faits pour cela ; et néanmoins ils ne le sont nullement, mais des violentes occupations. Car, n’est-ce pas occupation de tenir l’esprit bandé et tendu par une attention continuelle, et agité de perpétuelles inquiétudes, appréhensions et empressements ? Y a-t-il attention plus triste, plus sombre et mélancolique que celle des joueurs ? c’est pourquoi il ne faut pas parler sur le jeu, il ne faut