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Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, 1619, édition Boulenger, 1909.pdf/368

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de dévotion, elle en multiplie d’autant plus les œuvres solides, et abonde en la génération intérieure des vraies vertus, de patience, humilité, abjection de soi-même, résignation et abnégation de son amour-propre.

C’est donc un grand abus de plusieurs, et notamment des femmes, de croire que le service que nous faisons à Dieu, sans goût, sans tendreté de cœur et sans sentiment, soit moins agréable à sa divine Majesté, puisqu’au contraire nos actions sont comme les roses, lesquelles bien qu’étant fraîches elles ont plus de grâce, étant néanmoins sèches elles ont plus d’odeur et de force : car tout de même, bien que nos œuvres faites avec tendreté de cœur nous soient plus agréables, à nous, dis-je, qui ne regardons qu’à notre propre délectation, si est-ce qu’étant faites en sécheresse et stérilité, elles ont plus d’odeur et de valeur devant Dieu. Oui, chère Philothée, en temps de sécheresse notre volonté nous porte au service de Dieu comme par vive force, et par conséquent il faut qu’elle soit plus vigoureuse et constante qu’en temps de tendreté. Ce n’est pas si grand cas de servir un prince en la douceur d’un temps paisible et parmi les délices de la cour ; mais de le servir en l’âpreté de la guerre, parmi les troubles et persécutions, c’est une vraie marque de constance et fidélité. La bienheureuse Angèle de Foligny dit que l’oraison la plus agréable à Dieu est celle qui se fait par force et contrainte, c’est-à-dire celle à laquelle nous nous rangeons, non point pour aucun goût que nous y ayons, ni par inclination, mais purement pour plaire à Dieu, à quoi notre volonté nous porte comme à contre-cœur, forçant et violentant les sécheresses et répugnances qui s’opposent à cela. J’en