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Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, 1619, édition Boulenger, 1909.pdf/39

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hommes, comme celui des Séraphins entre les anges, si que leur loisir ne peut être mieux destiné qu’à cela. Les anciens évêques et Pères de l’Église étaient pour le moins autant affectionnés à leur charge que nous, et ne laissaient pourtant pas d’avoir soin de la conduite particulière de plusieurs âmes qui recouraient à leur assistance, comme il appert par leurs épîtres ; imitant en cela les Apôtres qui, emmi la moisson générale de l’univers, recueillaient néanmoins certains épis plus remarquables avec une spéciale et particulière affection. Qui ne sait que Timothée, Tite, Philémon, Onésime, sainte Thècle, Appia étaient les chers enfants du grand saint Paul, comme saint Marc et sainte Pétronille, de Saint Pierre ? Sainte Pétronille, dis-je, laquelle, comme prouvent doctement Baronius et Galonius, ne fut pas fille charnelle, mais seulement spirituelle de saint Pierre. Et saint Jean n’écrit-il pas une de ses Épîtres canoniques à la dévote dame Électa ?

C’est une peine, je le confesse, de conduire les âmes en particulier, mais une peine qui soulage, pareille à celle des moissonneurs et vendangeurs, qui ne sont jamais plus contents que d’être fort embesognés et chargés ; c’est un travail qui délasse et avive le cœur par a suavité qui en revient à ceux qui l’entreprennent, comme fait le cinamome, ceux qui le portent parmi l’Arabie Heureuse. On dit que la tigresse, ayant retrouvé un de ses petits, que le chasseur lui laisse sur le chemin pour l’amuser, tandis qu’il emporte le reste de la portée, elle s’en charge, pour gros qu’il soit, et pour cela n’en est point plus pesante, ains plus légère à la course qu’elle fait pour le sauver dans sa tanière, l’amour natu-