Aller au contenu

Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, Curet, 1810.djvu/118

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de ne donner à votre cœur aucune agitation violente ; car, en s’épanchant dans ce mouvement, il perdroit ce baume céleste qu’il a reçu dans la méditation : je veux dire qu’il faut un peu demeurer dans le silence si vous le pouvez, et retenant l’idée et le goût de vos bonnes affections, faire passer doucement votre cœur de l’oraison aux affaires. Imaginez-vous un homme qui a reçu dans un beau vase de porcelaine quelque liqueur de grand prix pour l’emporter chez lui ; voyez-le marcher pas à pas sans regarder derrière soi ni à côté ; mais toujours devant soi, de peur de faire un faux pas ou de heurter à quelque pierre, et il s’arrête même quelquefois pour voir si le mouvement de ce vase ne lui fait rien perdre de sa précieuse liqueur. Conduisez-vous de la sorte après votre méditation ; ne vous laissez pas distraire et dissiper tout d’un coup, mais regardez avec une simple et tranquille attention le chemin que vous avez à tenir : s’il se présente une personne à qui vous deviez parler, c’est une nécessité, et il faut s’y accommoder ; mais ayez de l’attention sur votre cœur, de peur qu’il ne perde la précieuse suavité dont le Saint-Esprit l’a rempli dans l’oraison.

Il faut même vous accoutumer à passer de l’oraison à toutes les actions que votre profession exige de vous, bien qu’elles vous paroissent fort éloignées des sentimens et des résolutions de votre méditation. Ainsi,