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Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, Curet, 1810.djvu/299

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vaillent à faire un miel exquis ? Si donc un étourdi vous dit des paroles messéantes, témoignez qu’elles vous déplaisent, soit en vous détournant pour parler à quelqu’un, soit d’une autre manière que votre prudence vous suggérera.

C’est une fort mauvaise qualité, que celle d’avoir l’esprit de moqueur : Dieu hait extrêmement ce vice, et l’a puni autrefois souvent et fort sévèrement ; rien n’est si contraire à la charité, et beaucoup plus à la dévotion, que le mépris du prochain ; or la dérision porte essentiellement ce mépris : elle est donc un très-grand péché, et les Docteurs ont raison de dire, que, de toutes les manières d’offenser le prochain par les paroles, celle-ci est la plus mauvaise, parce qu’elle porte toujours du mépris, au lieu que l’estime peut subsister avec les autres. Mais à l’égard de ces jeux de paroles et d’esprit, qui se font entre d’honnêtes gens avec une certaine gaîté, laquelle ne blesse ni la charité ni la modestie, ils appartiennent à la vertu, que les Grecs nomment Eutrapélie, et que nous pouvons appeler l’art de converser agréablement, et ils servent à réjouir l’esprit en ces petites occasions que les imperfections humaines des uns et des autres fournissent au divertissement. Mais l’on doit prendre garde de ne pas laisser aller cette honnête gaité d’humeur jusqu’à la moquerie, parce que la dérision provoque à