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Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, Curet, 1810.djvu/301

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ténèbres, et manifester les conseils des cœurs. O que les jugemens téméraires sont désagréables à Dieu ! Les jugemens des enfans des hommes sont téméraires, parce qu’ils ne sont pas juges les uns des autres, et qu’ils usurpent les droits et l’office de Notre-Seigneur ; ils sont encore téméraires, parce que la principale malice du péché dépend de l’intention et du conseil du cœur, et c’est le secret des ténèbres pour nous ; ils sont enfin téméraires, parce que c’est assez à chacun que d’avoir à se juger soi-même, sans entreprendre de juger son prochain. Il est également nécessaire, pour n’être point jugé, de ne pas juger les autres, et de se juger soi-même ; puisque le Sauveur nous défend l’un, et que l’Apôtre nous ordonne l’autre en ces termes : Si nous nous jugions nous-mêmes nous ne serions point jugés. Mais, ô Dieu ! nous faisons tout le contraire ; car nous faisons ce qui nous est défendu, en jugeant notre prochain à tout propos ; et à l’égard de ce qui nous est ordonné, nous ne le faisons jamais, et c’est de nous juger nous-mêmes.

Les jugemens téméraires ayant divers principes, il faut y apporter des remèdes differens ; il y a des cœurs naturellement aigres, amers et sévères, qui répandent leur aigreur et leur amertume indifféremment sur toutes choses, et qui changent le jugement et la justice en absynthe,