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Page:De Staël – De l’Allemagne, Tome 1, 1814.djvu/286

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LA LITTÉRATURE ET LES ARTS

J. J. Rousseau a dit que les langues du midi étaient filles de la joie, et les langues du nord, du besoin. L’italien et l’espagnol sont modulés comme un chant harmonieux ; le français est éminemment propre à la conversation ; les débats parlementaires et l’énergie naturelle à la nation ont donné à l’anglais quelque chose d’expressif qui supplée à la prosodie de la langue. L’allemand est plus philosophique de beaucoup que l’italien, plus poétique par sa hardiesse que le français, plus favorable au rhythme des vers que l’anglais : mais il lui reste encore une sorte de roideur qui vient peut-être de ce qu’on ne s’en est guère servi ni dans la société ni en public.

La simplicité grammaticale est un des grands avantages des langues modernes ; cette simplicité, fondée sur des principes de logique communs à toutes les nations, rend très-facile de s’entendre ; une étude très-légère suffit pour apprendre l’italien et l’anglais ; mais c’est une science que l’allemand. La période allemande entoure la pensée comme des serres qui s’ouvrent et se referment pour la saisir. Une construction de phrases à peu près telle qu’elle existe chez les anciens s’y est introduite plus facilement que dans aucun autre dialecte européen ; mais les inversions ne conviennent