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Page:De Staël – De l’Allemagne, Tome 1, 1814.djvu/367

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DE LA POÈSIE ALLEMANDE

me renferme ; conduis les amants au repos à travers les flammes ; et quand l’étincelle brillera, et quand les cendres seront brûlantes, nous nous hâterons d’aller ensemble rejoindre nos anciens dieux. »

Sans doute un goût pur et sévère doit blâmer beaucoup de choses dans cette pièce ; mais quand on la lit dans l’original, il est impossible de ne pas admirer l’art avec lequel chaque mot produit une terreur croissante : chaque mot indique sans l’expliquer l’horrible merveilleux de cette situation. Une histoire, dont rien ne peut donner l’idée, est peinte avec des détails frappants et naturels, comme s’il s’agissoit de quelque chose qui fût arrivé ; et la curiosité est constamment excitée sans qu’on voulut sacrifier une seule circonstance pour qu’elle fût plus tôt satisfaite.

Néanmoins cette pièce est la seule parmi les poésies détachées des auteurs célèbres de l’Allemagne contre laquelle le goût français eut quelque chose à redire : dans toutes les autres les deux nations paraissent d’accord. Le poëte Jacobi a presque dans ses vers le piquant et la légèreté de Gresset. Matthisson a donné à la poésie descriptive, dont les traits étoient souvent trop vagues,