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Page:De Staël – De l’Allemagne, Tome 2, 1814.djvu/299

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De la déclamation.

nération nouvelle. Le caractère de cet homme n’a rien de méchant, et cependant la vanité l’égare autant que s’il étoit vraiment pervers. Il a laissé faire à sa fille un mariage raisonnable, mais obscur, et tout à coup il lui conseille de divorcer. Une badine à la main, souriant gracieusement, se balançant sur un pied et sur l’autre, il propose à son enfant de briser les liens les plus sacrés : mais ce qu’on aperçoit de vieillesse à travers une élégance forcée, ce qu’il y a d’embarrassé dans son apparente insouciance est saisi par Iffland avec une admirable sagacité.

À propos de Franz Moor, frère du chef des brigands de Schiller, Ilfland examine de quelle manière les rôles de scélérats doivent être joués. « Il faut, dit-il, que l’acteur s’attache à faire sentir par quels motifs le personnage est devenu ce qu’il est, quelles circonstances ont dépravé son âme, enfin l’acteur doit être comme le défenseur officieux du caractère qu’il représente. » En effet, il ne peut y avoir de vérité, même dans la scélératesse, que par les nuances qui font sentir que l’homme ne devient jamais méchant que par degrés.

Iffland rappelle aussi la sensation prodigieuse que produisoit, dans la pièce d’Emilia Galotti,