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Page:De Staël – De l’Allemagne, Tome 3, 1814.djvu/30

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LA PHILOSOPHIE ET LA MORALE.

à celle où nous sommes, il sentiroit le besoin de ranimer la source intérieure du beau moral et de rappeler sans cesse à l’homme qu’il existe en lui-même dans son sentiment et dans sa volonté. Quand le siècle est superstitieux, le génie de l’observation est timide, le monde physique est mal connu ; quand le siècle est incrédule, l’enthousiasme n’existe plus, et l’on ne sait plus rien de l’âme ni du ciel.

Dans un temps où la marche de l’esprit humain n’avoit rien d’assuré dans aucun genre, Bacon rassembla toutes ses forces pour tracer la route que doit suivre la philosophie expérimentale, et ses écrits servent encore maintenant de guide à ceux qui veulent étudier la nature. Ministre d’état, il s’étoit long-temps occupé de l’administration et de la politique. Les plus fortes têtes sont celles qui réunissent le goût et l’habitude de la méditation à la pratique des affaires : Bacon étoit, sous ce double rapport, un esprit prodigieux ; mais il a manqué à sa philosphie ce qui manquoit à son caractère : il n’était assez vertueux pour sentir en entier ce que c’est que la liberté morale de l’homme ; cependant on ne peut le comparer aux matérialistes du dernier siècle, et ses successeurs ont poussé la théorie de