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Page:De Staël – La Révolution française, Tome II.djvu/110

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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

gumentation fût le caractère distinctif de son éloquence, on sentoit tant d’âme au fond de ses raisonnemens, que l’on en étoit ému. Son caractère portoit l’empreinte de la dignité angloise, comme celui de son antagoniste ; mais il avoit une candeur naturelle, à laquelle le contact avec les hommes ne sauroit porter atteinte, parce que la bienveillance du génie est inaltérable.

Il n’est pas nécessaire de décider entre ces deux grands hommes, et personne n’oseroit se croire capable d’un tel jugement. Mais la pensée salutaire qui doit résulter des discussions sublimes dont le parlement anglais a été le théâtre, c’est que le parti ministériel a toujours eu raison, quand il a combattu le jacobinisme et le despotisme militaire ; mais toujours tort, et grand tort, quand il s’est fait l’ennemi des principes libéraux en France. Les membres de l’opposition, au contraire, ont dévié des nobles fonctions qui leur sont attribuées, quand ils ont défendu les hommes dont les forfaits perdoient la cause de l’espèce humaine ; et cette même opposition a bien mérité de l’avenir, quand elle a soutenu la généreuse élite des amis de la liberté qui, depuis vingt-cinq ans, se dévoue à la haine des deux partis en France,