Aller au contenu

Page:De Staël – La Révolution française, Tome II.djvu/172

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
165
SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

M. Pitt, cependant, avoit donné lui-même quelques éloges à la constitution de 1795 ; et d’ailleurs, si le système politique adopté par la France, quel qu’il fût, cessoit de compromettre la sûreté des autres pays, que pouvoit-on exiger de plus ?

Les passions des émigrés, auxquelles le ministère anglois s’est toujours beaucoup trop abandonné, lui ont souvent fait commettre des erreurs dans le jugement des affaires de France. Il crut opérer une grande diversion en transportant les royalistes à Quiberon, et n’amena qu’une scène sanglante, dont tous les efforts les plus courageux de l’escadre angloise ne purent adoucir l’horreur. Les malheureux gentilshommes françois qui s’étoient vainement flattés de trouver en Bretagne un grand parti prêt à se lever pour eux, furent abandonnés en un instant. Le général Lemoine, commandant de l’armée françoise, m’a raconté avec admiration les tentatives réitérées des marins anglois pour s’approcher de la côte, et recevoir dans les chaloupes les émigrés cernés de toutes parts, et fuyant à la nage pour regagner les vaisseaux hospitaliers de l’Angleterre. Mais les ministres anglois, et M. Pitt à leur tête, en voulant toujours faire triompher en France le parti purement