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Page:De Staël – La Révolution française, Tome II.djvu/319

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CONSIDÉRATIONS

mier rang de ceux des hommes d’état, et peut-être étoit-il le seul qui se fût montré profond dans l’art d’administrer un grand pays sans s’écarter jamais de la moralité la plus scrupuleuse, et même de la délicatesse la plus pure. Comme écrivain religieux, il n’avoit jamais cessé d’être philosophe ; comme écrivain philosophe, il n’avoit jamais cessé d’être religieux ; l’éloquence ne l’avoit pas entraîné au delà de la raison, et la raison ne le privoit pas d’un seul mouvement vrai d’éloquence. À ces grands avantages il avoit joint les succès les plus flatteurs en société : madame du Deffant, la femme de France à qui l’on reconnoissoit la conversation la plus piquante, écrivit qu’elle n’avoit point rencontré d’homme plus aimable que M. Necker. Il possédoit aussi ce charme, mais il ne s’en servoit qu’avec ses amis. Enfin, en 1789, l’opinion universelle des François étoit que jamais un ministre n’avoit porté plus loin tous les genres de talens et de vertus. Il n’est pas une ville, pas un bourg, pas une corporation en France, dont nous n’ayons des adresses qui expriment ce sentiment. Je transcris ici, entre mille autres, celle qui fut écrite à la république de Genève par la ville de Valence.