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Page:De Staël – La Révolution française, Tome III.djvu/103

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CONSIDÉRATIONS

toujours le crédit. De là vient qu’on souffre assez de n’en pas avoir, puisqu’on n’obtient qu’à ce prix les signes de la bienveillance sur la figure humaine. Il faut beaucoup de fierté d’âme et beaucoup de constance dans ses opinions pour se passer de cet avantage, car vos amis eux-mêmes vous font sentir ce que vaut la puissance exclusive, par l’empressement qu’ils témoignent à ceux qui la possèdent.

En Angleterre, le parti de l’opposition est souvent mieux reçu en société que celui de la cour ; en France, on s’informe, pour inviter quelqu’un à dîner, s’il est en faveur auprès des ministres, et, dans un temps de famine, on pourroit bien refuser du pain aux hommes en disgrâce.

Les bonapartistes avoient joui des hommages de la société pendant leur règne, tout comme le parti royaliste qui leur succédait, et rien ne les blessoit autant que de n’occuper qu’une place très-secondaire dans les mêmes salons où jadis ils dominaient. Les hommes de l’ancien régime avoient de plus sur eux l’avantage que donnent la grâce et l’habitude des bonnes manières d’autrefois. Une jalousie constante subsistoit donc-entre les anciens et les nouveaux titrés ; et dans les hommes nouveaux,