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Page:De Staël – La Révolution française, Tome III.djvu/21

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CONSIDÉRATIONS

de Dieu. Les rois de France qui, en vertu du régime féodal, rendoient hommage pour telle province, ne faisoient pas moins usage de cette formule ; et les princes et les évêques, jusqu’aux plus petits feudataires, s’intituloient seigneurs et prélats par la grâce de Dieu. Le roi d’Angleterre emploie aujourd’hui la même formule qui n’est dans le fait qu’une expression d’humilité chrétienne ; et cependant une loi positive de l’Angleterre déclare coupable de haute trahison quiconque soutiendroit le droit divin. Il en est de ces prétendus priviléges du despotisme, qui ne peut jamais en avoir d’autres que ceux de la force, comme du passage de saint Paul : Respectez les puissances de la terre, car tout pouvoir vient de Dieu. Bonaparte a beaucoup insisté sur l’autorité de cet apôtre. Il a fait prêcher ce texte à tout le clergé de France et de Belgique ; et, en effet, on ne pouvoit refuser à Bonaparte le titre de puissant de la terre. Mais que vouloit dire saint Paul, si ce n’est que les chrétiens ne devoient pas s’immiscer dans les factions politiques de son temps ? Prétendroit-on que saint Paul a voulu justifier la tyrannie ? n’a-t-il pas résisté lui-même aux ordres émanés de Néron, en prêchant la religion chrétienne ? Et les martyrs obéissaient-ils à la défense