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Page:De Staël - Corinne ou l'Italie, Tome II, 1807.djvu/214

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CORINNE OU L’ITALIE.

rend maîtresse d’un esprit supérieur, elle sépare entièrement le raisonnement de l’action, et pour égarer l’une elle n’a pas besoin de troubler l’autre.

Les cheveux de Corinne et son voile pittoresquement arrangés par le vent donnaient à sa figure une expression tellement remarquable, qu’en l’apercevant au point du jour, quelques femmes du peuple, furent étonnées de voir une telle femme sortir à cette heure de l’église ; et leur imagination italienne et religieuse croyant voir en elle quelque chose de miraculeux, elles se jetèrent à ses genoux pour l’invoquer. Corinne fut émue de ce témoignage si naïf d’enthousiasme, et soupira de nouveau en quittant un peuple dont les impressions sont si vives.

Mais ce n’était pas tout encore, il fallait que Corinne fût mise à l’épreuve des adieux et des regrets de ses amis. Ils inventèrent des fêtes pour la retenir encore quelques jours. Ils composèrent des vers pour lui répéter de mille manières qu’elle ne devait pas les quitter ; et quand enfin elle partit, ils l’accompagnèrent tous à cheval jusques à vingt milles de Rome. Elle était profondément attendrie ; Oswald baissait les )eux avec confusion, il se reprochait de la ravir à tant de jouissances, et cependant il savait