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Page:De Staël - Corinne ou l'Italie, Tome II, 1807.djvu/245

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CORINNE OU L’ITALIE.

peu ce qui s’est passé depuis quinze siècles, qu’ils appellent encore les Romains les tout-puissans. Il est vrai qu’ils montrent des connaissances plus modernes, en vous nommant, vous autres Anglais, les guerriers de la mer, parce que vous avez souvent abordé dans leurs ports, mais ils ne savent rien du reste de la terre. Je me plairais à voir, continua Corinne, tous les pays où il y a dans les mœurs, dans les costumes, dans le langage, quelque chose d’original. Le monde civilisé est bien monotone, et l’on en connaît tout en peu de temps ; j’ai déjà assez vécu pour cela. — Quand on vit près de vous, interrompit lord Nelvil, voit-on jamais le terme de ce qui fait penser et sentir ! — Dieu Veuille, répondit Corinne, que ce charme aussi ne s’épuise pas ! —

— Mais donnons encore, poursuivit-elle, un moment à cette Dalmatie ; quand nous serons descendus de la hauteur où nous sommes, nous n’apercevrons même plus les lignes incertaines qui nous indiquent ce pays de loin aussi confusément qu’un souvenir dans la mémoire des hommes. Il y a des improvisateurs parmi les Dalmates, les sauvages en ont aussi ; on en trouvait chez les anciens Grecs : il y en a presque toujours parmi les peuples qui ont de l’imagi-