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Page:De Staël - Corinne ou l'Italie, Tome II, 1807.djvu/318

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CORINNE OU L’ITALIE.


CHAPITRE II.


QUAND Oswald eut lu la lettre de son père, remise par M. Dickson, il fut long-temps le plus malheureux et le plus irrésolu de tous les hommes. Déchirer le cœur de Corinne, ou manquer à la mémoire de son père, c’était une alternative si cruelle, qu’il invoqua mille fois la mort pour y échapper ; enfin il fit encore ce qu’il avait fait tant de fois, il recula l’instant de la décision, et se dit qu’il irait en Italie, pour rendre Corinne elle-même juge de ses tourmens et du parti qu’il devait prendre. Il croyait que son devoir l’obligeait à ne pas épouser Corinne. Il était libre de ne jamais s’unir à Lucile. Mais de quelle manière pouvait-il passer sa vie avec son amie ? Fallait-il lui sacrifier son pays ou l’entraîner en Angleterre, sans égard pour sa réputation ni pour son sort ? Dans cette perplexité douloureuse, il serait parti pour Venise, si, de mois en mois, on n’avait pas répandu le bruit que son régiment allait être embarqué ;