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Page:De Staël - Corinne ou l'Italie, Tome II, 1807.djvu/366

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CORINNE OU L’ITALIE.

peut-être l’est-il encore ! Pourquoi le blâmer, parce que je souffre ? peut-être ne le sait-il pas, peut-être s’il me voyait …… — Et tout à coup elle prit la résolution de faire demander lord Nelvil, au milieu de cette fête, et de lui parler à l’instant. Elle remonta vers le château avec l’espèce de mouvement que donne une décision nouvellement prise, une décision qui succède à de longues incertitudes ; mais en approchant elle fut saisie d’un tel tremblement, qu’elle fut obligée de s’asseoir sur un banc de pierre qui était devant les fenêtres. La foule des paysans rassemblés pour voir danser empêcha qu’elle ne fût remarquée.

Lord Nelvil, dans ce moment, s’avança sur le balcon : il respira l’air frais du soir ; quelques rosiers qui se trouvaient là lui rappelèrent le parfum que portait habituellement Corinne, et l’impression qu’il en ressentit le fit tressaillir. Cette fête longue et ennuyeuse le fatiguait ; il se souvint du bon goût de Corinne dans l’arrangement d’une fête, de son intelligence dans tout ce qui tenait aux beaux-arts, et il sentit que c’était seulement dans la vie régulière et domestique qu’il se représentait avec plaisir Lucile pour compagne. Tout ce qui appartenait le moins du monde à l’imagination, à la poésie,