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Page:De l'excellence et de la supériorité de la femme.djvu/123

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Tous reçurent un cœur ; aucun ne s’en tint-là ;
C’est peu d’avoir chacun le nôtre,
Nous en cherchons partout un autre.
Nature, en fait de cœurs, se prête à tous les goûts ;
J’en ai vu de toutes les formes,
Grands, petits, minces, gros, médiocres, énormes,
Mesdames et Messieurs, comment les voulez-vous ?
On fait, partout, d’un cœur tout ce qu’on veut en faire,
On le prend, on le donne, on l’achète, on le vend ;
Il s’élève, il s’abaisse, il s’ouvre, il se resserre.
C’est un merveilleux instrument :
J’en jouois bien dans ma jeunesse ;
Moins bien pourtant que ma maîtresse.
O vous, qui cherchez le bonheur,
Sachez tirer parti d’un cœur !
Un cœur est bon à tout, par tout on s’en amuse ;
Mais à ce joli petit jeu
Au bout de quelque temps il s’use,
Et chacune et chacun finissent, en tout lieu,
Par en avoir trop ou trop peu.
Ainsi, comme un franc hérétique,
Je médisois du Dieu de la terre et du ciel ;
En amour j’étois tout physique :
C’est bien un point essentiel,
Mais ce n’est pas le point unique ;
Il est mille façons d’aimer ;
Et ce qui prouve mon système,
C’est que la bergère que j’aime
En a mille de me charmer :
Si de ces mille, ma bergère,
Par un mouvement généreux,
M’en cédoit une pour lui plaire,
Nous y gagnerions tous les deux.