Aller au contenu

Page:Delacroix - Journal, t. 1, éd. Flat et Piot, 2e éd.djvu/491

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
415
JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

les Schubert, les rêveurs, les Chateaubriand (il y a longtemps que j’avais commencé), les Lamartine, etc. Pourquoi tout cela se passe-t-il ? Parce que ce n’est point vrai… Est-ce que les amants regardent la lune, quand ils trouvent près d’eux leur maîtresse ?… À la bonne heure, quand elle commence à les ennuyer.

Des amants ne pleurent pas ensemble ; ils ne font pas d’hymnes à l’infini, et font peu de descriptions. Les heures vraiment délicieuses passent bien vite, et on ne les remplit pas ainsi.

Les sentiments des Méditations sont faux, aussi bien que ceux de Raphaël, du même auteur. Ce vague, cette tristesse perpétuelle ne peignent personne. C’est l’école de l’amour malade… C’est une triste recommandation, et cependant les femmes font semblant de raffoler de ces balivernes ; c’est par contenance ; elles savent bien à quoi s’en tenir sur ce qui fait le fond même de l’amour. Elles vantent les faiseurs d’odes et d’invocations, mais elles attirent et recherchent soigneusement les hommes bien portants et attentifs à leurs charmes.

— Ce même jour, Mme P… est venue avec sa sœur, la princesse de B… La nudité de la Femme impertinente[1], et celle de la Femme qui se peigne, lui ont sauté aux yeux : … « Que pouvez-vous trouver là de

  1. C’est sous ce titre que Delacroix désignait, dans la conversation, une de ses Baigneuses. À propos de ce tableau, M. Robaut écrit : « La jeune femme a la tête ceinte d’un ruban bleu qui flotte sur son dos ; elle s’appuie sur un banc de verdure où sont déposés des vêtements qui éclatent en tons blancs et rouges. »