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Page:Delacroix - Journal, t. 2, éd. Flat et Piot, 2e éd.djvu/221

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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

donné aucune idée exacte de cette symphonie ou de cette peinture. Il faut voir ce qui est fait pour les yeux ; il faut entendre ce qui est fait pour les oreilles. Ce qui a été écrit pour être débité fera même plus d’effet dans la bouche d’un orateur que par un simple lecteur. Un grand acteur transformera, pour ainsi dire, un morceau par son accent… Je m’arrête.

F… me conseille d’imprimer, comme elles sont, mes réflexions, pensées, observations, et je trouve que cela me va mieux que des articles ex professo. Il faudrait les récrire pour cela à part, chacune sur une feuille séparée, et les mettre au fur et à mesure dans un carton… Je pourrais ainsi, dans les moments perdus, en mettre au net une ou deux, et au bout de quelque temps, j’aurais fait un fagot de tout cela, comme fait un botaniste, qui va, mettant dans la même boîte les herbes et les fleurs qu’il a cueillies dans cent endroits, et chacune avec une émotion particulière.

Samedi 21 mai. — Jour où Pierret et Riesener sont venus.

Toute la matinée, fait des pastels d’après les lions et les arbres que j’avais étudiés la veille, au Jardin des Plantes ; vers deux heures un quart, j’ai été au-devant d’eux ; je trouve Pierret bien changé…

Pourquoi la vue de deux amis si anciens, et dans ce lieu en pleine liberté, sous le ciel et au milieu des beautés du printemps, ne me donne-t-elle pas une plénitude de bonheur que je n’eusse pas manqué de