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Page:Delacroix - Journal, t. 2, éd. Flat et Piot, 2e éd.djvu/239

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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

par moments, et dont le titre est plus léger que ne le comporte le caractère de morceau. Sonate de Beethoven déjà connue, mais admirable. Cela me plaît beaucoup sans doute, surtout à la partie douloureuse de l’imagination. Cet homme est toujours triste. Mozart, qui est moderne aussi, c’est-à-dire qui ne craint pas de toucher au côté mélancolique des choses, comme les hommes de son temps (gaieté française, nécessité de ne s’occuper que de choses attrayantes, bannir de la conversation et des arts tout ce qui attriste et rappelle notre malheureuse condition), Mozart réunit ce qu’il faut de cette pointe de délicieuse tristesse à la sérénité et à l’élégance facile d’un esprit qui a le bonheur de voir aussi les côtés agréables. Je me suis élevé contre leur ami R… qui n’aime pas Cimarosa, qui ne le sent pas, à ce qu’il dit, avec une certaine satisfaction de lui-même. Que Chopin est un autre homme que cela ! Voyez, leur ai-je dit, comme il est de son temps, comme il se sert des progrès que les autres ont fait faire à son art ! Comme il adore Mozart, et comme il lui ressemble peu ! Son ami Kiatkowski lui reprochait souvent quelques réminiscences italiennes, qui sentent, malgré lui, les productions modernes des Bellini, etc… C’est une chose aussi qui me déplaît un peu… Mais quel charme ! Quelle nouveauté d’ailleurs !

1er juillet. — En commission chez M. Fould, pour l’Exposition universelle de 1855.