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Page:Delacroix - Journal, t. 2, éd. Flat et Piot, 2e éd.djvu/246

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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

mouvement, qui porte les novateurs à sortir de l’ornière tracée, vient presque toujours celui qui les porte, à la fin de leur carrière, à retenir l’impulsion indiscrète qui va trop loin et qui ruine par l’exagération ce qu’ils ont inventé. Ils se prennent à vanter ce qu’ils ont été cause qu’on a abandonné, en voyant le triste usage qu’on fait des nouveautés qu’ils ont lancées dans le monde. Peut-être y a-t-il un secret mouvement d’égoïsme qui les porte à régenter à ce point leurs contemporains, que personne ne puisse qu’eux-mêmes toucher à ce qui leur paraît critiquable ? Ils sont médiocres par ce côté ; cette faiblesse leur fait jouer souvent un rôle ridicule et indigne de la considération qu’ils ont acquise.

Champrosay. — Jeudi 6 octobre. — Parti pour Champrosay à onze heures. J’ai eu cette fois deux fiacres pour me transporter et faire transporter mes bagages ; moyen préférable et plus économique que celui de la voiture du commissionnaire.

J’étais souffrant depuis plus d’une semaine. Dimanche, j’ai pris un froid aux oreilles qui m’a donné des douleurs dont je souffre encore : c’était pendant mon équipée du Jardin des Plantes. J’ai pu dire, en arrivant comme Tancrède, ce que je dis toujours en arrivant ici :

Qu’avec ravissement je revois ce séjour !

Avant dîner, le temps était fort beau, contre son