Aller au contenu

Page:Delacroix - Journal, t. 2, éd. Flat et Piot, 2e éd.djvu/483

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
467
JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

— Barbotte me conte qu’on peut féconder la vigne au moyen d’abeilles, qu’on porte auprès, quand la pluie a détrempé le pollen. Il me dit qu’à Lima il ne pleut jamais ; aussi tout y est aride.

— Chenavard me dit, à propos de mes idées sur la peinture, que je donne l’exemple et le précepte, et admirablement, dit-il. Il admire beaucoup, au Luxembourg, certaines peintures qui lui paraissent faire ressortir la platitude des autres… « Je me demande quelquefois, dit-il encore, s’il sait bien lui-même tout ce qu’il met dans ces ouvrages-là[1]. »

2 octobre. — A Saint-Sulpice de bonne heure. Travaillé à redessiner l’Héliodore renversé.

Été à pied porter la lettre de remerciements au préfet de police, ensuite aux canaux, et rentré.

A cinq heures et demie, trouvé à la Rotonde Varcollier et dîné ensemble chez Véry. Le vin y était plus mauvais qu’à Dieppe. Restés ensemble au café de la Rotonde, nous promenant dans le jardin, etc. Il m’avait conduit chez l’opticien.

— V… est aimable pour moi, et je suis touché de son empressement. Malheureusement, ce que j’appelais l’amitié est une passion que je ne ressens plus au même degré, et il est surtout bien tard pour la

  1. Cette observation caractéristique nous rappelle le propos qu’un amateur lança un jour à Corot, en le voyant dans le feu de l’exécution d’un tableau : « Tenez ! vous ne savez pas ce que vous y mettez ! » Corot se retourne un instant, puis reprend son travail en murmurant : « Il a peut-être raison ! »