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Page:Delarue-Mardrus - Le Pain blanc, 1932.djvu/87

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CHAPITRE IX


U n preste tour de clé. La porte était ouverte.

— Passe, ma chérie !

Élysée n’eut pas le temps de bien regarder le beau vestibule où des vitrines de musée semblaient contenir tant de merveilles.

— Nous voilà !… cria le docteur.

Poussée dans le salon immense, l’adolescente se trouva comme jetée sur la nouvelle Mme Arnaud, qui, de son côté, s’avança vivement.

Il y eut, de part et d’autre, un très court arrêt dans l’élan donné. Le premier contact eut certainement la rapidité, la rudesse d’un choc. Mais si avides étaient les deux regards lancés l’un vers l’autre que tous les détails, en une fois, furent enregistrés.

Élysée vit la haute et fine silhouette distinguée, altière, le long cou dans la lingerie, cerclé de perles et sorti d’un tailleur sobre, la petite tête ligotée dans ses minces nattes ; elle vit le teint aux reflets étroits, bleus, catégoriques, fascinants comme ceux de l’épervier, elle vit le regard d’une demi-seconde, vertigineuse bête de proie qui s’abattait sur elle.

Elle ne put même pas enregistrer le brusque frisson qui la parcourait. Les deux élans, interrompus dans l’espace d’un éclair, se remettaient en route.

— Oh ! par exemple ! Mais c’est tout le portrait de son père !

Deux petites mains autoritaires l’avaient saisie aux épaules.