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Page:Delly - Dans les ruines, ed 1978 (orig 1903).djvu/115

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que vous m’apporterez ce soir, sans y manquer, entendez-vous, Mathurine ?

— Soyez tranquille, madame… Je sais l’intérêt que vous portez aux enfants de Mlle Gaétane, répliqua la servante d’un ton énigmatique.

Mme Orzal se détourna un peu brusquement et sortit de l’appartement de ses neveux, tandis que Mathurine rentrait dans la chambre où Alix faisait boire à son frère le breuvage fumant.

— Mademoiselle, j’ai pris sur moi de la renvoyer. J’ai pensé que sa vue vous ferait mal… c’est-à-dire… vous serait un peu désagréable…

— Oui… oh ! oui, Mathurine, elle me fait peur ! dit Alix avec un frémissement de tout son être. Demain, quand je serai un peu remise de mon inquiétude, je pourrai la voir sans colère… pourvu que mon Xavier guérisse…

Elle s’arrêta, effrayée des paroles qu’elle venait de prononcer. En ces quelques mots et dans les réticences de Mathurine se trouvait enfermée une accusation terrible.

— Je suis folle ! dit-elle en passant la main sur son front mouillé de sueur. Xavier est un enfant très aventureux ; il aime le mystère et a profité de notre absence pour se glisser dans la partie inhabitée du château. Quelques portes se sont trouvées ouvertes, par hasard… C’est une chose très possible, n’est-ce pas, Mathurine ?

En attachant sur la servante un regard d’anxieuse supplication, elle répéta encore :

— C’est ainsi que la chose a dû se passer… et pas autrement… dites, Mathurine ?

— Oui, c’est ainsi… Demeurez en paix, mademoiselle, dit doucement Mathurine en posant sa main calleuse sur la blanche main d’Alix. Veillez sur vos frères, moi, je veille sur vous.