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Page:Delly - Dans les ruines, ed 1978 (orig 1903).djvu/63

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Gaétan considérait Mathurine avec attention. Il demanda tout à coup en désignant sa main mutilée :

— Qui vous a fait cela, Mathurine ?

La servante devint blême et ses lèvres tremblantes murmurèrent quelques mots inintelligibles.

— C’est une bête qui t’a mordue, dis ? interrogea Xavier en levant vers elle son joli regard curieux.

— Oui, monsieur Xavier, répondit-elle laconiquement en se détournant pour regagner la cuisine.

— C’est un chien, dis ?

Elle fit un signe affirmatif et s’éloigna.

— Comme elle est drôle, cette Mathurine ! dit Gaétan en se penchant au bras de sa sœur, qui se dirigeait vers l’escalier. L’autre jour, je lui ai demandé quand elle avait eu la petite vérole, mais elle s’est mise à pleurer et ne m’a pas répondu. On croirait quelquefois qu’elle est un peu folle, comme Fanche.

Folle ?… Non, Mathurine ne l’était certes pas, mais, véritablement, il y avait chez elle quelque chose de bizarre, des réticences mystérieuses qui intriguaient Alix. Certainement, la servante était instruite des secrets de Bred’Larguest…, tristes secrets, sans doute, puisqu’elle refusait obstinément d’en laisser transpercer quelque indice… Cependant les circonstances se présentaient plus favorables. La cuisinière choisie à Lorient par Mme Orzal était arrivée la veille et Mathurine avait été promue en grade de femme de chambre. Ces fonctions devant la rapprocher plus fréquemment d’Alix, celle-ci se promettait d’agir discrètement sur cette nature fermée afin d’obtenir les renseignements nécessaires pour se garder de Georgina.