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Page:Delthil - Angélique, 1869.djvu/19

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Or, elle rebondit si haut après sa chute,
Qu’elle en eut le vertige et se prit à songer ;
Mais le mauvais esprit l’emporta dans la lutte,
En lui soufflant ces mots : « Où donc est le danger ?

« Quand le cœur n’aime plus, la femme est toujours forte,
« Reculer maintenant, ce serait t’avouer
« Coupable, et ta vengeance est-elle déjà morte ?
« Allons, tu dois forcer le monde à te louer

« Comme à te craindre, il faut que chacune jalouse
« Ton luxe et tes succès, il faut épouvanter
« Du pouvoir de tes yeux et l’amante et l’épouse ;
« Il faut qu’il puisse encor, l’ingrat, te regretter. »




En plein Paris, dès lors, la superbe baronne
Etale sans pudeur ses charmes insolents,
On la hait, on la craint, elle effraie, elle étonne,
Les plus audacieux près d’elle sont tremblants.

Portant monocle d’or, éperons et cravache,
Excentrique, en un mot, de la nuque au talon,
Elle fait à Longchamps, avec l’air d’un bravache,
Écumer et bondir un fougueux étalon.

Et le monde applaudit à ces excès d’audace.
Roger même, dit-on, sur un propos léger,
Vient de se battre avec celui qui le remplace
Dans le boudoir d’Angèle, à l’heure du berger.