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Page:Delzant - Les Goncourt, 1889.djvu/132

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MM. de Goncourt furent remercier M. Thierry, au Théâtre-français, et lui dire de ne pas se donner l’ennui de lire la pièce, qu’elle était impossible pour son théâtre. M. Thierry insista et elle lui fut envoyée ; mais, sur la promesse qu’on leur fit d’une lecture au Vaudeville, les auteurs durent bientôt redemander le manuscrit. M. Thierry a raconté plus tard, dans les numéros des 9 et 23 février 1885 du Moniteur universel, qu’il était alors un peu embarrassé pour alimenter le répertoire d’été de la Comédie. Les écrivains dramatiques en possession de la vogue, ne souffrent pas qu’on joue leurs pièces pendant la chaleur ; c’eût été une bonne fortune pour le théâtre que de découvrir alors un ouvrage d’auteurs nouveaux, sans exigences, se contentant de l’espoir des demi-recettes.

M. Éd. Thierry crut trouver, dans Henriette, la pièce qu’il cherchait, et, bien résolu, s’il pouvait l’obtenir, à la mettre immédiatement à l’étude et à pousser les répétitions, il écrivit aux auteurs :

« Messieurs et chers confrères,

« … Je ne sais pas si le Vaudeville vous attend et si vous êtes en pourparlers avec lui ; ce que je sais, c’est que la pièce ne me semble pas plus impossible au Théâtre-français qu’au Vaudeville. Ce que le Théâtre-français retrancherait dans le premier acte, sera retranché partout ailleurs et avec les mêmes ciseaux : ceux de la commission d’examen. Le dénouement est brutal, je ne dis pas non, et le coup de pistolet est terrible ; mais il n’y a pas encore là d’impossibilité absolue. Au fond, je vois dans votre pièce, non pas précisément une pièce bien faite, mais un début très remarquable, et, pour ma part, je serais heureux de présenter au public cette première passe-d’armes de deux vrais et sincères talents qui gagnent leurs éperons au théâtre.

« Tout à vous,
« Édouard Thierry.
« 27 avril 1865. »