Aller au contenu

Page:Delzant - Les Goncourt, 1889.djvu/149

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion

pareille orgie ; j’ai cru que l’orchestre se dérobait sous mes pieds et on faisait un tapage d’enfer au paradis ; — tant mieux !

« Oui, tant mieux, car nous sommes las d’Aristide ! J’aime mieux Giboyer, ohé ! mais Giboyer toujours ! J’ai assez de la toge et du cothurne ! Je n’aime les Romains qu’au parterre et je crains les Grecs partout ! J’en ai entendu du romain avant Henriette Maréchal !

« Horace et Lydie ? — Il m’a semblé voir des domestiques qui, après avoir bu du Falerne au litre, auraient déshabillé le plancher et l’alcôve pour s’habiller avec les tapis de pieds et les rideaux de lit ! J’ai cru voir les anneaux de la tringle ! Mets-toi-les au nez, sauvage ! Plût au ciel… que les deux derniers actes eussent eu la crânerie insolente du premier, Henriette Maréchal était l’Hernani du réalisme !

« Ah ! nous étions tous là, nous qui ne sommes pas chauves, édentés, vieux avant l’heure, pour protester, pour applaudir quand la vérité moderne, le rire aux lèvres, une goutte de Champagne aux yeux, écorcherait, avec ses éperons de carnaval, la robe de ces dames Clio, Thalie ou Melpomène !

« À Sainte-Périne !

« … On a applaudi avec enthousiasme, sifflé avec acharnement. Il y avait au poulailler une hostilité opiniâtre… C’est une défaite, mais la soirée est bonne. On a dit : “As-tu fini ? ohé, c’te tête !” et les murs n’ont pas croulé ! En sortant, j’ai vu des têtes d’académiciens froncer leurs sourcils de marbre. Voltaire riait. Ohé c’te tête !!! »

Les auteurs, par respect pour la grande comédienne qui avait résisté, toute la soirée de la veille, aux huées sauvages et aux insultes d’une partie du public,