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Page:Delzant - Les Goncourt, 1889.djvu/169

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éclat dans vingt-quatre colonnes du Constitutionnel.

C’est que les Goncourt, replongés, depuis Henriette Maréchal, dans le rude labeur de leurs romans et de leurs livres d’histoire, étaient rentrés dans la lutte obscure. Ils suivaient sans concession et sans faiblesse un chemin qu’ils ouvraient devant eux. Manette leur avait coûté deux longues années de travail ; un journaliste, M. Lermina, dans le Corsaire du 29 novembre 1867, la jugeait dédaigneusement en quelques lignes : « À quoi bon tout cela ? À quelle idée ont obéi les auteurs de ce roman, de ce rabâchage, pour parler net… Ce sont les grands prêtres de l’inutilisme ! »

M. Albert Wolff ne fut guère plus indulgent, dans le Figaro : « Ils sont comme les peintres à qui manque la fantaisie et qui se rattrapent sur le détail. Leurs tableaux ne parlent pas à l’âme, mais on ne peut s’empêcher d’admirer l’exécution de tel morceau. »

Mais, dans ce même Figaro, trois jours après, Manette Salomon trouva un défenseur inattendu. M. Alphonse Duchesne qui, au temps de leur publication, s’était donné le plaisir de dénier tout mérite aux Hommes de lettres, s’en prit cette fois directement à M. Wolff et publia, dans leur journal commun, le 30 novembre 1867, une réponse à son article d’où nous extrayons ce court passage : « Il m’est impossible de ne pas reconnaître en MM. de Goncourt deux écrivains de haut vol et en Manette Salomon, une œuvre remarquablement littéraire, à laquelle on ne saurait refuser une haute estime sans outrager, en même temps, la justice et le bon goût… Il y a des parties de leur dernier livre qui sont, il me semble, les tronçons d’un pur chef-d’œuvre : par exemple les lettres de Coriolis à son ami, le dénombrement des