Aller au contenu

Page:Delzant - Les Goncourt, 1889.djvu/284

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ni forme ni modelé. L’apparence grave, mélancolique, presque sévère du modèle a été traduite en une altitude mondaine. Jamais l’auteur du Caractérisme ne s’est plus complètement trompé sur un caractère. Des mouchetures de bleu cru tachètent le personnage, du haut en bas, et — quoi qu’en disent les théoriciens de la couleur — ne se fondent pas dans l’ensemble. Ce bleu-là, la nature ne le met pas dans une tête, mais on le trouve dans les livres spéciaux, au chapitre des rapports des tons et des couleurs complémentaires. C’est là que les chimistes et les physiciens s’en délectent. L’art n’a rien à faire avec leurs formules. Les mains fines et charmantes du modèle, ces mains d’amateur dont les doigts ressemblent à des tentacules languides, qui ont des attouchements de caresses et embrassent un objet d’art comme des lèvres, ont l’air d’un écheveau de corde. Mais la vasque japonaise, le fauteuil, les tapis persans superposés, la sanguine de Watteau et les deux portraits de Gavarni sont des tâches d’exécution supérieure. Les ombres et les lumières contrastées, sans transitions, l’aspect tumultueux et désordonné de l’ensemble, n’en constituent pas moins, avec de très grandes qualités et de très grands défauts, un morceau de peinture personnel et puissant.

L’aspect est aussi la qualité principale d’un grand pastel, en largeur, de Giuseppe de Nittis. M. de Goncourt est représenté au milieu de ses livres. Là encore, tous les entours de la figure sont de main de maître, mais ne se retrouvent pas l’expression et la ressemblance. Le peintre, qui s’est essayé aussi à la sculpture, n’a pas été plus heureux dans le buste en bronze, à cire perdue, qu’il a fait de son ami.

On voit, au musée du Luxembourg, un grand dessin très poussé, très voulu, donnant un peu l’aspect d’un