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Page:Delzant - Les Goncourt, 1889.djvu/40

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mantes, ont laissé des traces dans ses Lettres. On a conservé quelques-unes de celles qu’à treize ans et demi, pendant les vacances, il écrivait à son petit camarade d’école Louis Passy. Elles ouvrent naturellement le volume et montrent, dès le début, une franchise de jet, une netteté, un mouvement d’idées tout à fait curieux chez un enfant et qui sont la marque d’une intelligence déjà ouverte et d’un vrai tempérament d’artiste. Les lettres d’écrivains, surtout quand ils les ont faites très jeunes et en toute sincérité de forme, offrent, le plus souvent, un intérêt singulier. Elles sont une indication qui ne trompe guère pour décider de la valeur littéraire de leurs auteurs. Sont-elles embarrassées et incolores, il est vraisemblable qu’on n’a pas affaire à un artiste de race. L’étude et l’attention pourront procurer à son style, plus tard, la correction ornée, les formes apprises, une beauté d’école et de placage ; elles ne lui donneront pas le sang qui manque, c’est-à-dire la vigueur native et la santé.

Restée veuve en 1834, la mère des Goncourt s’était presque exclusivement dévouée à la santé fragile de son plus jeune fils. Pour lui éviter les séparations du collège, elle s’était retirée du monde. Elle avait pour lui tous les soins et toutes les tendresses. Elle était fière de ce bel enfant frêle, espiègle, spirituel et charmant qui montait, dans ses classes successives du collège Bourbon, avec des alternatives de joie et de tristesse, rencontrant, en sixième, un terrible pédagogue, M. Herbette, qui l’engagea, sans miséricorde, dans les steeple-chases du Grand Concours. En effet, en quatrième, il y remporta les seconds prix de version grecque et de version latine, le premier accessit d’histoire. Il entra enfin dans « cette bienheureuse classe de rhétorique où il fila toute l’année, fabriquant,