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Page:Des Monts - Les Legendes des Pyrenees 3e, 1876.djvu/163

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Rêver toujours les délices d’une blanche main que l’on tient dans la sienne, et savoir que cette même main si désirée frissonne d’amour sous l’étreinte d’une autre main, oh ! c’est horrible !

Et Paul était forcé de vivre avec cette pensée ! Aussi voulut-il en finir avec tous ses tourments

— Un soir, en effet, qu’il traversait le pont de la Concorde pour regagner la rue Royale, qu’il habite, il s’arrêta comme frappé d’une sorte de vertige à la vue des flots bleus de la Seine, qui semblaient l’attirer et lui dire : « Viens dans notre discret linceul ensevelir les souffrances de ta vie ; viens, et tu seras heureux, car tu oublieras. »

Et il contemplait toujours d’un œil d’envie ces palais splendides de l’oubli entr’ouvrant devant lui leurs portes d’azur limpide où se miraient les pâles clartés des étoiles.

Et il allait priant Dieu tout bas de lui pardonner d’obéir à cette mauvaise inspiration de l’esprit des ténèbres, quand les cris plaintifs d’une pauvre petite, murmurant de sa voix éteinte : « Pour ma mère, monsieur, je vous en prie, pour ma mère ! » vinrent frapper son oreille.

Cette simple et touchante prière le sauva ; il pensa à sa mère, à sa pauvre mère qui mourrait de sa mort.