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Page:Des Monts - Les Legendes des Pyrenees 3e, 1876.djvu/257

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vagues vaporeusement soulevées. Quand le regard a longtemps erré, flotté sur cette calme et brillante surface, sur cette immense nappe étincelante comme une draperie de diamants, il vient à l’œil je ne sais quel vague et doux éblouissement. On dirait que le lac tout entier avec les rochers qui le bordent, les crêtes qui le dominent, les arbres qui le frangent, se soulève lentement, capricieusement, comme si lassé de la terre il voulait se rapprocher de l’éternel azur qui lui prête l’éclat de son soleil et le reflet de ses étoiles. Et ce mirage, né plutôt dans l’imagination et dans la vue, a le charme rêveur et perçant qui s’attache à toutes les choses indécises et vaporeuses ; il captive sans enchaîner, il fascine sans éblouir. L’esprit comprend qu’il est la dupe d’une illusion mensongère, mais l’illusion est charmante et il s’y repose. C’est que l’idéal, quel qu’il soit, est une impérieuse, une invariable loi de la nature. L’homme n’a pas seulement besoin de tromper son âme et son cœur, il a aussi besoin de tromper son œil. Sans l’idéal, sans ce je ne sais quoi qui est en nous, et se répand hors de nous en capricieux rayons ou en légers sourires : quel site serait toujours charmant, quel lac toujours pur, quelle femme toujours belle !…

Maintenant entre tous ces lacs, après celui de Gaube dont nous ne vous entretiendrons pas ici,