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Page:Des Vignons - Betty petite fille, 1922.djvu/155

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BETTY PETITE FILLE


fillette fut brusquement soulevée par une exubérance indomptable. Elle rit très fort, parla à tort et à travers, oubliant pour un moment sa prudence coutumière.

Profitant de l’inattention maternelle, elle but un grand verre de champagne. Une brûlure la mordit à l’estomac, mais son esprit lui parut plus lucide, comme débarrassé d’un poids énorme.

La tête renversée en arrière, les yeux moqueurs, elle jeta autour d’elle un regard curieux, ce qu’elle n’avait jamais osé aussi impudemment jusque là.

Une émotion violente l’étreignit au cœur, elle pâlit, tandis que ses paupières se baissaient à demi.

Deux jeunes gens en smoking dînaient à une table non loin. Ils se souriaient de leurs lèvres rougies, avaient des gestes mignards, des poses alanguies. Ils étaient très beaux, d’une beauté d’éphèbes insexués.

On les regardait, mais ils ne s’en inquiétaient guère, ignorant ce qu’était la honte.

L’un était blond, l’autre brun, ils avaient de la poudre sur les joues, voire un peu de rouge aux pommettes.

Et Betty fut conquise, elle crut voir en eux le prince charmant de ses rêves. Ce qui l’attirait et qu’elle ignorait, c’était le vice véritable et qu’elle sentait instinctivement en eux.