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Page:Des Vignons - Betty petite fille, 1922.djvu/46

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BETTY PETITE FILLE

— Embrassez-vous plutôt enfants, que vous êtes !

Ils obéirent, mais en hésitant, les gestes timides, gênés par la présence des parents.

Les deux amies rirent plus fort.

— Sont-ils innocents ! assura Madame Cérisy, en penchant la tête sur l’épaule gauche.

Cependant la fillette était pressée de regagner la solitude de sa chambrette. Il y avait en elle de l’orgueil, parce qu’elle avait noté la supériorité de sa science, sur celle du garçonnet. En pensant à lui, elle avait une petite moue dédaigneuse, s’assurant que si les rôles étant intervertis, elle avait été le mâle, son initiative se serait mieux manifestée.

Elle fut longue à s’endormir, secouée par une nervosité insurmontable. Naïve, elle croyait aux sensations extrêmes, aux affolements des sens, ce qui dans la réalité ne se présente jamais. La machine humaine, malgré son apparence ordonnée, reste bien imparfaite, elle est incapable de varier ou de prolonger la faculté de sentir au delà d’une certaine limite, toujours la même.

Et c’est cela justement qui pervertit le cœur des jeunes gens ; ignorants, ils aspirent à un bonheur extraordinaire qui ne se réalisera jamais et avec les premiers essais viennent les premiers dégoûts.