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Page:Desmoulins - Satyres, 1789.djvu/16

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VERS
SUR LA DÉTENTION DE M. LE CARDINAL
DE ROHAN À LA BASTILLE.


Illustre prisonnier, tirrez-nous d’embarras :
Êtes-vous Cardinal, ou ne l’êtes-vous pas ?
Hélas ! seroit-il vrai que la cruelle Rome
Ait pu dans sa fureur dégrader un Saint homme ?
Un Rohan ! répondez : vous détournez les yeux !
Ah ! vous pleurez le sort de vos tristes cheveux.
Vous voilà donc réduit à la simple calotte !
Ce n’est pas le seul mal que vous ait fait la Motte :
Si, docile aux avis d’un sage confident,
Vous eussiez écarté ce dangereux serpent,
Heureux, tendres amis, votre union si belle,
Auroit semé de fleurs votre course immortelle ;
Elle auroit égalé les ans du vieux Nestor,
Et pour vous deux enfin, ramené l’âge d’or.
Mais à tes tristes yeux, quelle funeste image !
Un Rohan dans les fers, un Rohan qu’on outrage !
Et Maurepas n’est plus, hélas ! dans sa fureur
L’enfer a dévoré ton ami, ton vengeur :
Prélat, Dieux ! quel excès d’horreur, d’ignominie !
Je te vois sur les quais pendu en effigie ;
Je vois l’oint du Seigneur, un prince des autels,
Au milieu des héros, par Charlot immortel.