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Page:Desrosiers - Les Opiniâtres, 1941.djvu/141

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Bien pourvus d’armes à feu, les Iroquois se ruèrent sur les peuplades environnantes. Ils débutèrent par la destruction de quelques bandes algonquines. Après avoir mis à sac plusieurs bourgades huronnes, ils pourchassèrent sans merci cette tribu nombreuse qui, saisie de panique, abandonna ses hameaux et se précipita dans des embûches, la famine et des malheurs sans fin. En une campagne, ils dispersèrent la nation du Pétun ; ils décimèrent le peuple Neutre aussi puissant que le peuple huron ; à la suite de quelques escarmouches sanglantes, ils refoulèrent les Sorciers ou Nipissings sur les froids de l’extrême nord ; ils infligèrent des défaites aux Attikamègues et aux Montagnais ; ils anéantirent presque toutes les missions, le père Jogues fut assommé d’un coup de hache, plusieurs jésuites subirent d’atroces supplices ou tombèrent sous les balles. Possédés de frénésie meurtrière, les Iroquois élargissaient chaque jour l’immensité de l’aire déjà arrosée du sang de quarante mille cadavres. Peu nombreux, perdant quelques guerriers dans chaque bataille malgré tous leurs avantages, ils s’exterminaient du même coup et ne conservaient leur force première qu’en adoptant des groupes d’ennemis.

Seuls, deux îlots demeuraient dans ce vide : Ville-Marie et les Trois-Rivières. En toutes saisons, les Iroquois rôdaient autour des deux fortins comme des hardes de loups. Un Algonquin était scalpé aujourd’hui, un Français le lendemain ; un soldat partait pour la chasse et ne revenait pas ; un colon s’éloignait pour la pêche et s’affaissait sous les balles ; soudain enveloppés d’ennemis, des bûcherons semaient de morts leur retraite ; des moissonneurs tombaient d’un coup de casse-tête au milieu des gerbes.