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Page:Dessaulles - Lettres de Fadette, cinquième série, 1922.djvu/132

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c’était un bon garçon, sobre, dévot, bref, il devint le bedeau du village. Ah ! mes amis, ce qu’il sonnait bien après quelques mois ! Tout le monde le complimentait, jamais on n’avait entendu les cloches chanter si bien…

Voilà mon Gapit gonflé d’orgueil ; fier de son importance, il oublie ses infirmités, se croit un homme comme les autres et il s’amourache de la plus jolie fille du village : il se dit comme ça que, puisqu’il peut la faire vivre grassement, il n’y a pas de raison pour qu’elle dise non. Mais elle avait son idée qui n’était pas celle de Gapit et elle le refuse.

C’était le Samedi Saint, — un drôle de jour pour une demande en mariage, mais Gapit ne faisait rien comme les autres, — et c’était à l’heure où Gapit devait faire revenir ses cloches de Rome. Elle lui dit non et elle file son chemin ; il ne répond rien et s’en va sonner ses trois cloches.

Ce fut si beau, sa sonnerie, cette fois-là, qu’on aurait dit que c’était sur de la musique que les cloches volaient pour s’en revenir ! Mais voilà-t-il, pas qu’au milieu du carillon, ding ! une longue plainte, puis une autre, et une troisième… Gapit sonne-t-il des glas ? mais personne n’est mort, et l’heure est mal choisie ! Les fenêtres s’ouvrent, les perrons se garnissent de curieux qui veulent savoir ce qui arrive. Ding ! une dernière plainte longue, et faible, comme si le cœur de la grosse cloche s’en allait dans un dernier soupir. On prend sa course vers