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Page:Dessaulles - Six lectures sur l'annexion du Canada aux États-Unis, 1851.djvu/140

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conduire, à l’étranger, une négociation d’une immense importance, sans paraître seulement se douter de l’avenir prochain qui est réservé à ce pays ?

Messieurs, là comme ailleurs, le ministère n’a pas su sortir de son ornière de prédilection, les intrigues de coterie, les parlages d’antichambre, les moyens détournés, les circonvolutions ordinaires aux hommes qui sont incapables de s’élever jusqu’à la position qu’ils occupent ; qui sont dans les grands emplois comme un homme placé sur une montagne : tout lui parait petit mais aussi il parait petit à tout le monde.

En un mot on a voulu faire comme d’habitude, de l’habileté et, comme d’habitude, on n’a fait que du galimatias.

Je crois, Messieurs, avoir démontré, qu’à moins d’offrir aux États-Unis une mesure de réciprocité juste, raisonnable, également avantageuse aux deux parties, il est illusoire d’espérer aucunes conditions favorables du gouvernement fédéral.

Il me reste maintenant à vous faire voir comment la réciprocité ne produira pas au pays la dixième partie des avantages que nous sommes sûrs de trouver dans l’annexion.

À proprement parler, la réciprocité ne guérira qu’une seule des plaies de toute espèce qui rongent ce pays et diminuent ses forces vitales ; elle augmentera le prix de nos grains et de nos bois qui n’est pas suffisant pour rémunérer le producteur.

Mais aussi veuillez faire attention que si d’un coté la réciprocité doit avoir l’effet d’enrichir le producteur, d’un autre coté elle aura inévitablement l’effet d’appauvrir le gouvernement ; car il est évident que nous n’obtiendrons pas la réciprocité sur les grains et les bois sans l’offrir en même temps, sur les objets manufacturés ; alors le gouvernement de la province perdra un revenu de $8 ou 900,000 qu’il prélève sur nos importations de produits manufacturés américains. Or c’est parce que le ministère sentait qu’il était impossible, sans ce revenu, de faire face à tous les besoins du gouvernement qu’il a proposé cette mesure de réciprocité dont on s’est moqué à bon droit dans les États-Unis.

Ainsi donc, la seule réciprocité que nous puissions espérer d’obtenir augmentera bien le revenu du producteur canadien, mais diminuera d’un tiers celui du gouvernement, tel qu’il se perçoit aujourd’hui.