Page:Dessaulles - Six lectures sur l'annexion du Canada aux États-Unis, 1851.djvu/4

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çaise gémissait sous un état de choses, sur lequel elle n’avait que le contrôle d’une opposition de cris et de pleurs ; sous un état de choses où les individus et les masses étaient condamnés à la nullité politique, à l’appauvrissement graduel de l’intelligence et de la fortune. Fatiguée d’être gouvernée et exploitée par une nationalité rivale, à laquelle l’Angleterre nous livrait à merci, elle tenta en 1837, de secouer le double joug du gouvernement métropolitain et de sa rivale dans la colonie. Ce malheureux essai, sans rien changer de sa condition humiliante, eut néanmoins l’effet de faire reconnaître la justice de ses griefs. Cette reconnaissance se traduisit par la concession du gouvernement dit responsable.

Mais cette concession, qui eut pu remédier à tous les maux dont nous nous plaignions, si elle eut été franche et honnête, nous fut faite à la condition de l’Union des deux Canadas ; c’est-à-dire, à la condition que nous serions toujours nuls et sans poids ; parceque l’adjonction des deux pays nous mettait en face d’une population hostile, numériquement plus faible, mais politiquement plus forte et continuant à nous dominer dans les Chambres par l’inégalité de la représentation.

Cette concession ne changea donc rien dans la condition des masses et ne pouvait qu’enrichir quelques individus, qui, soit par trahison ou par étroitesse de vues, pouvaient à l’avenir se joindre aux oppresseurs de leurs compatriotes.

L’oppression en se couvrant du manteau du patriotisme n’en était donc devenue que plus difficile à combattre et le système de l’exploitation du grand nombre par la minorité, se consolidait par cette concession.

La population anglaise qui depuis longtemps tirait de si grands profits de l’administration du gouvernement colonial, s’emparait insensiblement de presque tout le commerce du pays. Les produits du Canada qui leur passaient presque tous par les mains, jouissaient sur les marchés anglais du privilège d’entrer sans payer les droits de douane auxquels étaient assujettis les produits des autres nations. Les marchands du Canada trouvaient donc, dans cette protection et ce privilège, une compensation contre le désavantage de ne pouvoir vendre sur les marchés américains, qui leur étaient fermés par la ligne douanière qui nous en sépare.

La condition des marchands anglais du Canada était donc superbe ; maîtres du gouvernement colonial et privilégiés sur le marché de l’Angleterre, ils avaient là deux sources de fortune auxquelles puisaient directement ou indirectement tous leurs nationaux.

Mais en 1847, l’Angleterre ayant aboli le système fiscal qui taxait les produits des peuples étrangers, sur ses marchés, les exportateurs du Canada se trouvèrent vis-à-vis de ces peuples dans une égalité ruineuse, en ce que l’exportation du Canada était beaucoup plus coûteuse que celle des pays limi-