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Page:Destrée - Le Secret de Frédéric Marcinel, 1901.pdf/69

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rien ne vous autorise à exclure d’emblée telle ou telle catégorie de délits. Les attentats à la moralité pas plus que les autres. Il n’y a pas un mot dans les travaux préparatoires à cet égard. Ces infractions-là sont, au surplus, les plus difficiles à apprécier. C’est pour elles surtout qu’est vrai le proverbe : Vérité en deçà, erreur au delà ! L’autre jour, en Cour d’assises, on poursuivait un homme qui avait distribué des méthodes indiquant, en termes peu voilés, les précautions à prendre contre la fécondation, et ces mémoires étaient tout simplement des feuillets de propagande de la ligue néo-malthusienne, reconnue d’utilité publique chez le vertueux peuple de Hollande, et y comprenant des notabilités considérables qui estiment, non sans quelque raison, qu’on ne peut infliger à la femme, sans son consentement, les souffrances, les charges, parfois les hontes d’une maternité imprévue. Ensuite, l’adultère ne porte qu’accessoirement atteinte à la moralité publique. C’est presque un délit privé, puisque le parquet ne peut agir sans plainte et que l’époux outragé peut toujours arrêter les effets de la décision du tribunal. Et vous voudriez que nous laissions dans les mains du goujat que nous avons vu tantôt la faculté de faire coffrer la malheureuse ? L’avertissement draconien de la condamnation n’est-il pas déjà excessif ? Pouvez-vous dire qu’il n’est point d’espoir d’amendement ?

— Vous y mettez tant de flamme, mon cher ami, que je suis disposé à me laisser fléchir. Mais il est bien entendu que ce ne sera point un précédent. La faveur exceptionnelle de l’espèce me décide seule. Cette femme est digne de toutes les circonstances atténuantes, je vous l’accorde.