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Page:Destutt de Tracy - Élémens d’idéologie, première partie.djvu/182

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À cette heure, supposons qu’à une sensation simple actuellement présente, vienne se joindre un souvenir d’une sensation passée, se confondra-t-il avec elle ou non ? Si l’on songe qu’il n’y a rien dans la nature de la mémoire qui nous avertisse qu’un souvenir est un souvenir, que nous-mêmes qui le savons bien, il nous arrive pourtant d’avoir des souvenirs sans savoir que ce sont des souvenirs, on n’hésitera pas à prononcer qu’un souvenir fera le même effet qu’une sensation actuelle, qu’il se confondra de même avec la première sensation, et qu’il n’y a encore rien à attendre de cette combinaison pour la naissance de l’action du jugement.

On doit donc conclure que tant qu’on ne connaît pas les circonstances, les causes, les moyens de ses sensations ; tant qu’on ignore l’existence des corps et celle de ses propres organes, l’action du jugement ne saurait commencer.

Or, on ne peut desirer qu’en conséquence d’un jugement ; on ne peut donc former un desir que quand on a porté au moins un jugement : ainsi tant qu’on n’a pas eu la sensation de mouvement, on ne juge ni ne