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Page:Destutt de Tracy - Élémens d’idéologie, première partie.djvu/433

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toujours heureux ou malheureux par eux, suivant qu’ils sont accomplis ou non.

Ils ont encore une autre particularité remarquable ; c’est que l’emploi de nos forces mécaniques et intellectuelles dépend en grande partie d’eux, ensorte que c’est par eux que nous sommes une puissance dans le monde.

De là vient que nous confondons plus notre moi avec cette faculté qu’avec toute autre, et que nous disons indifféremment, cela dépend de moi ou cela dépend de ma volonté.

De là vient aussi l’importance que nous attachons à posséder la volonté des autres, à ce qu’elle nous soit favorable, à ce qu’ils aient pour nous de la bienveillance.

Du desir de leur bienveillance naît avec raison le desir de leur estime, et du desir de leur bienveillance et de leur estime naît tout aussi justement le bien-être que nous éprouvons quand nous nous sentons animés de mouvemens de bienveillance, et le malaise qui nous tourmente quand nous nous reconnaissons travaillés de passions haineuses.

Une autre conséquence des propriétés de la volonté, c’est qu’il nous est très-important de la bien régler ; c’est que le moyen d’y parvenir est de rectifier nos jugemens, puisque nos desirs en sont la suite, et que le but à atteindre est d’éviter de former des desirs contradictoires, c’est-à-dire des desirs dont l’accomplissement nous conduirait à des manières d’être que nous souhaitons éviter, car dans ce cas notre bonheur est impossible.