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Page:Destutt de Tracy - Élémens d’idéologie, première partie.djvu/452

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précisément parce qu’il les porte avec peine, il en porte en même temps un grand nombre d’autres dont il ne s’aperçoit presque pas, justement parce qu’ils lui sont extrêmement familiers, et qui, par cette raison-là même, en excitent une foule d’autres, et l’entraînent en sens contraire.

Il y a en lui simultanéité et conflit de jugemens, les uns aperçus, les autres inaperçus, et ce sont toujours les plus habituels qui l’emportent, parce qu’ils réveillent un bien plus grand nombre d’impressions adjacentes. Il est vrai que pour goûter cette explication, il faut consentir à admettre qu’il se passe en nous en un instant un nombre prodigieux de mouvemens, et qu’il s’y exécute presque simultanément une quantité incroyable d’opérations intellectuelles dont nous n’avons pas même la conscience ; mais mille faits prouvent qu’il en est ainsi. Par exemple, n’est-il pas évident qu’il s’opère en un clin-d’œil une multitude innombrable de mouvemens et de combinaisons inaperçues dans l’homme qui lit rapidement un livre qu’il comprend, et plus encore dans celui qui écrit ses idées à course de plume ? Et d’ailleurs y a-t-il quelque chose de révoltant à supposer, quand tout porte à le croire, que le fluide nerveux égale ou surpasse le fluide lumineux en subtilité et en vitesse ?

Cette manière de voir nous conduit à comprendre comment se produisent les déterminations instinctives en général, et nommément celles de certains animaux qui, dès les premiers instans de leur existence, font des actions qui paraissent exiger un grand nombre de combinaisons, et même quelques connaissances acquises. Pour s’en rendre compte, il suffit de con-